Contrer le «racisme systémique» dans le financement
Photo prise par © Mylène Crête (Steven Guilbeault)
Pour avoir travaillé pendant 25 ans dans le communautaire, Steven Guilbault , l’actuel ministre du Patrimoine canadien (PCH) est bien au fait des difficultés, même pour des «organisations blanches», de trouver du financement, de remplir des formulaires souvent trop compliqués.
Et donc, pour les organisations racisées, émergentes ou « noires », les « barrières » sont encore plus hautes. Elles avaient toutes les peines du monde à trouver du financement avant l’arrivée de la COVID-19, ce qui est sur le point de changer.
«Nous avons, avant la pandémie, amorcé une réflexion là-dessus pour voir si les programmes sont adaptés à la réalité d’aujourd’hui. La pandémie est venue accélérer les choses.», confie le ministre Guilbault lors d’une entrevue à In Texto.
Le travail d’analyse est repris depuis. Et le PCH s’est rendu compte que les organisations créées et dirigées par des personnes des communautés ethniques sont largement défavorisées depuis très longtemps.
Au micro de In Texto, le ministre du Patrimoine se questionne sur une « forme de racisme systémique dans les programmes » gouvernementaux.
« À moins d’être une organisation bien établie depuis longtemps, souvent des organisations blanches, c’est très difficile pour les organisations racisées d’y avoir accès »-S Guilbault
Le député de la circonscription de Laurier Sainte-Marie, à Montréal, dit vouloir éliminer ces genres de barrières comme ministre du Patrimoine.
Au tout début de la pandémie, les grandes organisations étaient les seules à profiter des programmes d’urgence gouvernementaux alors qu’elles étaient déjà financées.
On parle de 25% du financement déjà reçu comme soutien financier additionnel qu’elles ont obtenu dès les premiers moments de la crise sanitaire.
Au total, le gouvernement a réservé une enveloppe de 500 millions pour le secteur des arts, de la culture, des sports et des médias.
Et de cette somme 200 millions sont destinés à des « organismes qui ne bénéficiaient pas normalement de cette aide », en raison de règles trop strictes. Et pour ce faire, Patrimoine canadien a dû « adapter les critères compte tenu de l’ampleur de la pandémie.»
Cette modification a permis à 147 médias ethnoculturels de produire une demande de financement dont la plupart sont en traitement actuellement.
Les fonds sont alloués de la façon suivante :
- Jusqu’à 326,8 millions de dollars seront administrés par Patrimoine canadien et répartis entre certains programmes du ministère et organismes du portefeuille, ainsi que les principaux organismes de prestation, plus précisément :
- 198,3 millions aux bénéficiaires du secteur des arts et de la culture par l’entremise des programmes existants ainsi qu’à d’autres organismes ayant démontré des besoins;
- 72 millions au secteur du sport;
- 53 millions au secteur du patrimoine par l’entremise du volet d’urgence du Programme d’aide aux musées;
- 3,5 millions à des projets liés à la COVID-19 dans le cadre de l’Initiative de citoyenneté numérique.
- 55 millions de dollars seront distribués par le Conseil des arts du Canada.
- 115,8 millions, pour appuyer le secteur audiovisuel canadien, seront distribués par le Fonds des médias du Canada (88,8 millions) et Téléfilm Canada (27 millions)
Le ministre Steven Guilbault admet qu’il reste du travail à faire afin de mettre les programmes fédéraux au diapason avec les communautés culturelles.
Il plaide en faveur d’une représentation plus adéquate dans les instances de décision des personnes racisées.
« Les postes sont affichés publiquement. Et on fait un effort de les diffuser dans les réseaux non traditionnels afin de toucher le plus possible les ethnies.», note M. Guilbault qui invite toutes les communautés à appliquer.
Depuis l’arrivée des libéraux en 2015, il y a eu plus de 50% d’embauches parmi les groupes de minorités visibles, de femmes, autochtones, avance le ministre.
Steven Guilbault affirme que le Canada doit débuter une discussion franche et sincère avec les différentes communautés ethnoculturelles sur la question du racisme systémique par exemple, reconnu par le premier ministre Justin Trudeau.
« Oui, ça va donner lieu à des conversations qui vont être désagréables, difficiles. Mais il faut le faire, il faut se remettre en question. Pour nous c’est la voix de l’avenir.»-S.Guilbault.