Une centaine de médecins noirs pour bientôt
Même si le nombre d’étudiants noirs admis en médecine, cette année, n’atteint pas le niveau de 2019 (19 au cours de la première année du programme d’accès), les Drs Jean-Michel Leduc et Isabelle Ferdinand sont très «contents» en cette 3e année.
Les admissions jouent au yoyo. La première cohorte comptait 19 étudiants noirs, un record. La 2e seulement 5 et cette année on enregistre une douzaine d’admis à la faculté de médecine de l’Université de Montréal (UdeM).
«Je note que ce sont des personnes qui se sont déclarées. Donc, il est possible qu’il y ait d’autres personnes noires inscrites et qui ont choisi de ne pas profiter du programme d’accès», relativise le Dr Leduc lors d’une rencontre avec les communautés noires fin septembre. C’est le Bureau de la Responsabilité sociale (BRS) de la Faculté de médecine de l’UdeM, l’Association médicale des Noirs du Québec (AMNQ) et le Sommet socioéconomique pour le développement des jeunes des communautés noires (SdesJ) qui pilotent ce dossier depuis trois ans.
L’UdeM se dit consciente des freins à une hausse des admissions de la part des communautés visées : noire et autochtone. À la suite des résultats l’année dernière, un sous-comité a été créé en vue d’étudier la question et faire une recommandation.
«Ce qu’on a réalisé, c’est qu’il est beaucoup question de communication sur le site web et d’accompagnement avec les associations d’étudiants et les acteurs du milieu », indique le Dr Leduc
«Il y avait un autre problème, renchérit le Dr Édouard Kouassi de l’AMNQ, c’est qu’il n’y avait pas de Noirs dans l’équipe d’évaluation. Cette année, 10% des évaluateurs sont issus des communautés noires. C’est un pas de géant », considère le président de l’AMNQ.
«Depuis trois, on parle d’une quarantaine d’étudiants noirs à l’UdeM, c’est vraiment exceptionnel », se réjouit la Dre Isabelle Ferdinand, d’origine haïtienne et co-responsable du programme d’accès avec le Dr Leduc. L’an dernier, on parlait d’environ 70 étudiants noirs en médecine dans les deux universités à Montréal. Avec les admissions de cette année pour les deux facultés de médecine, on s’approche d’une centaine de futurs médecins noirs.
«De manière disproportionnée»
Les personnes noires représentaient environ 4,5 % des postulants en médecine au Québec en 2020. Or, on estime à 1,8 % la proportion de candidates et candidats noirs à avoir été invités aux entrevues d’admission dans les facultés de médecine québécoises et à 1,2 % la proportion de celles et ceux qui y ont été acceptés en 2019. C’est le résultat d’une étude menée par le Dr Jean-Michel Leduc, coresponsable du programme d’accès depuis trois ans. Il est professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal.
«Ces chiffres laissent penser que les étudiantes et étudiants noirs qui font une demande d’admission en médecine sont rejetés de manière disproportionnée à la première étape par rapport aux étudiantes et étudiants non noirs», disait-il au moment de cette étude, ce qui n’est plus le cas.
«On va se le dire très franchement, il y a un phénomène de discrimination à travers la cote R ou le test Casper (test de jugement situationnel). C’est pour cela qu’on exige maintenant une cote R plancher, parce qu’on est conscient qu’avec une cote 32 les étudiants vont très bien réussir en médecine», affirme Michèle Glémaud, la directrice générale du service d’admission de l’UdeM.
Un programme inspirant
Le programme d’accès a inspiré 19 autres programmes qui visent des Noirs, mais aussi des Autochtones. Depuis trois ans, l’UdeM a mis sur pied un processus d’admission inclusive qui fait en sorte que l’étudiant n’est pas évalué uniquement sur sa cote R, mais avec d’autres critères également.
«Ce n’est pas une admission au rabais, c’est seulement qu’on tient compte du parcours des candidats », précise Mme Glémaud.
Dans ces programmes autres que la santé, les admissions sont en hausse : de 250 l’an dernier, on est passé à 350 inscriptions pour les communautés vissées.
En entrevue avec In Texto, le Dr Leduc, microbiologiste, souligne que les barrières pour ces communautés sont multifactorielles, ce que le Plan d’action de l’UdeM tente de briser. Il parle, dans le cheminement scolaire d’une méconnaissance qui fait en sorte que les élèves ne savent pas quel préalable faire et ils peuvent ne pas avoir de modèles de rôle dans leur entourage également.
En plus de leur permettre d’avoir accès à l’entrevue afin de faire valoir leur intérêt et de savoir, les universités réalisent des tournées dans les écoles afin de recruter, d’inciter les plus jeunes à considérer des carrières en santé. Elles font des sessions d’informations. Et, une fois admis, elles font pour «enlever les stéréotypes et les choses qui sont vexatoires dans l’environnement universitaire. , « Car il y a eu toute sorte de choses qui ont été véhiculées», rappelle le Dr Jean-Michel Leduc.