Canada :une trentaine de demandes d’asile depuis mars
Photo: RUTH KAPLAN
Seulement 29 demandeurs d’asile ont réussi à passer entre les mailles du filet et à produire une requête au Canada depuis la pandémie, sur la base des exceptions faites dans le Décret visant la réduction du risque d’exposition à la COVID-19 au Canada (interdiction d’entrée au Canada en provenance des États-Unis).
Il s’agit de citoyens des États-Unis, d’apatride qui ayant sa résidence habituelle aux États-Unis, entre autres, et qui scient bien avec la section «non application » de cette mesure temporaire et exceptionnelle.
On parle aussi de personnes ayant moins de 18 ans et qui n’est pas accompagnée par son père, sa mère ou son tuteur légal au sens du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés. Ces deux autres catégories font partie des exceptions également :
- elle n’a ni époux ni conjoint de fait au sens de ce règlement,
- elle n’a aux États-Unis ni père, ni mère, ni tuteur légal au sens de ce règlement.
À défaut de satisfaire à ces exigences, tous les demandeurs d’asile qui arrivent de façon irrégulière entre les points d’entrée (p. ex. chemin Roxham) ou par voie aérienne et maritime seront refoulés aux États Unis.
- Entre le 21 mars et le 13 Octobre, 175 demandeurs d’asile ont été renvoyés aux États-Unis;
- 171 d’entre eux étaient des demandeurs d’asile irréguliers.
- De ces 171, 123 ont été renvoyés aux États-Unis du Québec, 39 de la Colombie-Britannique et 9 du Manitoba.
« Les personnes renvoyées aux États-Unis pourront présenter une demande d’asile lorsque les restrictions à la frontière seront levées. Il s’agit de la même procédure qui est en place depuis un mois et qui s’applique toujours, sans changement.», indique Louis-Carl Brissette Lessage, porte-parole de Immigration à In Texto
Désespérés, mal informés, ils viennent surtout de la Floride (aux USA) et sont en majorité des Haïtiens parmi près de 130 personnes interceptées par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) à la frontière avec les États-Unis depuis la fermeture en raison de la COVID-19.
Ces gens-là ont vendu tout ce qu’ils avaient, pris leur petite économie pour se lancer dans ce périple sans se douter que, en raison de la pandémie, rares sont les gens qui traversent la frontière fermée depuis le 21 mars dernier. C’est d’ailleurs toujours barré.
« Il y a une quarantaine de familles avec enfants qui y sont coincées soit parce qu’elles ne pouvaient traverser pour le Canada ou qu’elles ont été refoulées aux USA par la police frontalière.», témoigne Wendy Ayotte, porte-parole de l’organisme Créons des ponts, qui déconseille aux gens de partir à cette aventure risquée maintenant.
Il s’agit d’un regroupement de personnes (des Canadiens) vivant à Hemmingford et les environs, près de Roxham Road, en bordure de la frontière canado-américaine, lieu de passage irrégulier utilisé par des personnes en provenance des USA.
L’organisme crée des ponts également avec Plattsburgh cares, basé du coté américain de la frontière et qui, les deux, viennent en aide à des demandeurs d’asile depuis 2017.
« Nos contacts sont brefs avec eux. Nous leur fournissons des vêtements chauds pendant l’hiver, de la nourriture etc…», explique Mme Ayotte.
Mais depuis la pandémie et l’abaissement des frontières un «Accord temporaire entre le Canada et les États-Unis » est intervenu et stipule que :
Les personnes qui entrent au Canada en provenance des États-Unis pour faire une demande d’asile seront renvoyées aux États-Unis de façon temporaire.
Cela s’applique : entre les points d’entrée officiels le long de la frontière terrestre; aux points d’entrée aériens et marins.
Selon Wendy Ayotte de l’organisme Créons des ponts, les personnes qui ont été refoulées à un point d’entrée irrégulière, se sont vu remettre une note qui les informe que «quand la frontière sera rouverte, ils pourront se présenter à un point officiel pour faire une demande d’asile.»
Mais le problème, dit-elle, c’est la situation coté américain. Plusieurs d’entre eux sont actuellement en prison à Plattsburgh ou dans la région de Buffalo, à mi-chemin entre Montréal et New York et « il est difficile d’avoir des informations sur combien ils sont en détention.»
Quelques rares familles ont réussi à s’installer le long de la frontière avec l’aide de Plattsburgh cares. Mais ces familles courent un grand risque selon la travailleuse humanitaire.
« Le fait d’être une personne de couleurs, près de la frontière, cela se voit tant que ça à Champlain. Et la police des frontières procède tout de suite à leur arrestation. »- W. Ayotte
Mensonges et agression verbale
- Depuis 2017 plus de 57 000 personnes ont produit une demande d’asile au Canada
- Nombre total de demandeurs d’asile traités par l’ASFC et IRCC, janvier – août 2020 : 18 810
Le nombre total de demandeurs d’asile interceptés par la GRC depuis janvier dernier s’élève à 3 161 dont 128 pendant la pandémie.
Au cours de la première vague (en 2017) de demandeurs de statut de réfugiés, Créons des ponts dit avoir constaté des comportements inacceptables de la part des agents de la Gendarmerie. Ce qui a poussé l’organisme à s’asseoir au moins à six reprises avec l’Agence des services frontaliers en vue d’améliorer leur approche.
« Ce n’était pas exactement des propos racistes, mais des attitudes qui témoignent du racisme. », estime la responsable de l’organisme.
Mme Ayotte dénonce le fait que la GRC induisait les gens en erreur en leur disant d’ «aller à un pont officiel pour faire leur demande », ce qui n’est pas forcément toujours possible en raison de l’Entente sur les pays tiers sûrs.