COVID-19: les aînés haïtiens et leur remède de grand-mère
La plupart ne se sont jamais faits tester à la COVID-19
Gingembre, citron, aloès (lalwa en créole), ananas, de l’ail et du miel compose la potion magique de Maxime Toussaint contre la COVID-19 ou pour « prévenir l’infection de manière générale’, dit-il.
Le septuagénaire qui affirme avoir guéri plus de 25 personnes atteintes du virus avance qu’après avoir avalé ce remède de grand-mère par petite cuillerée pendant trois jours, l’on ne devrait avoir plus de trace de COVID. Pourtant, M.Toussaint est vacciné.
« J’ai pris le vaccin pour pouvoir voyager, pour aller voir ma famille aux États-Unis.», dit-il.
Ils sont une quinzaine comme ça qui font partie du Club des aînés d’origine haïtienne, rencontrés par In Texto et qui vantent les bienfaits de ce mélange.
Maxime Toussaint est le coordonateur du Club des aïnés haïtiens de Montréal-Nord.
« Je me faisais tester et je prenais toujours la potion de Maxime. De plus, je gargarisais du vinaigre aussi. »-Mariane Jean
Mme Jean qui « était toujours dehors au plus fort de la pandémie », travaillait chez Olymel. Son usine a été infectée et par peur de la maladie, elle quitte la compagnie. Grâce à la potion de Maxime Toussaint, elle reprend confiance et se dirige vers les soins de santé après une formation éclaire.
Elle trouve un emploi comme préposée aux bénéficiaires dans un Centre hospitalier de soins de longue durée (CHSLD)
« Beaucoup de gens en sont morts, faute de soins se souvient-elle, j’alimentais une dame qui avait la COVID-19 au centre et mes collègues avaient peur de l’approcher. »
Jocelyne Alix et Mariame Jean, deux Haïtiennes, en première ligne depuis 2020, dans la lutte contre le virus
« Mais moi, je ne l’ai jamais eu. »-M.Jean
« Je ne peux pas vous dire si j’ai eu la covid ou pas. Je n’ai jamais fait de test.», nous dit de son côté, Chanel, un autre disciple de Maxime Toussaint.
En plus de la potion, il affirme toutefois se laver les mains régulièrement. « Je portais mes masques tous les jours et je travaillais au comptoir alimentaire. », ajoute le travailleur social à la retraite. Comme son ami Maxime, il s’est vacciné.
Jocelyne Alix qui travaille dans l’entretien ménager a vu son taux de sucre grimper le plafond, tellement elle avait peur au début de la COVID.
« J’avais peur et vraiment peur de la maladie. » nous confie-t-elle. À un point tel qu’elle en arrivait à perdre tous ses cheveux. Elle redoutait la quatorzaine obligatoire imposée à ceux qui contractaient la maladie.
« L’idée qu’on m’amène de la nourriture au seuil de ma porte me terrassait. Je ne suis pas un animal. J’aurais préféré mourir, je n’allais pas la récupérer cette bouffe.»-J. Alix
Jean Gabriel Rousseau quand à lui a vécu la première vague en Haïti en mars 2020. Lorsqu’il a voulu prendre les précautions d’usage, observer les gestes barrières, «ils me tournaient en dérision»
« Je n’ai jamais eu la covid. Je n’ai jamais fait le test non plus Mais je suis vacciné.», dit-il, comme les autres.
Le seul parmi la bande à ne pas prendre de vaccin est Pierre Paulin. Il affirme toutefois ne pas avoir attrapé la maladie.
« Je n’y crois pas. Et je ne me ferai pas vacciner. Si c’est pour une question de quitter le Canada : Voyager cela m’importe peu.»-P Paulin
Il ingurgite tous les jours le remède, désinfecte sa résidence régulièrement et tout devrait bien aller selon lui.
Les Noirs 3,5 fois plus
Dans son dernier rapport, daté de mars 2021, Statistiques Canada publie ces chiffres qui démontrent que le taux de mortalité par COVID est 3,5 fois plus élevé dans les quartiers où la population est composée à 25% ou plus de personnes issues de communautés racialisées.
Les minorités visibles sont surreprésentées dans le milieu de la santé comme travailleurs (de 22 à 32% entre 1996 et 2016)
En date de janvier 2021, les Philippins représentent 20% des travailleurs tandis que les Noirs sont de l’ordre de 19%
Montréal et Toronto sont les villes canadiennes où les populations noires sont les plus touchées
Lors de la première vague de coronavirus, les travailleurs et travailleuses de la santé n’étaient pas munis d’outils de protection de façon adéquate. Ils ont été largement infectés et transmettaient par la suite la maladie à leurs familles. Beaucoup en sont mort, d’ailleurs.
Aucune donnée au Québec
Motion du conseil municipal de Montréal, adoptée à l’unanimité, lettre de la présidence de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) au ministère de la Santé, Québec ne se ploie pas à ces demandes de collecte de données sur la race en lien avec la COVID-19.
Le conseiller de Snowdon, Marvin Rotrand, vient même d’écrire au tout nouveau ministre de la lutte contre le racisme, Benoit Charrette, afin de l’exhorter « à convaincre le cabinet du besoin d’adopter cette pratique exemplaire dans le cadre de la réponse à la pandémie de notre réseau de soins de santé.»
De marbre
«À la suite d’une analyse produite par l’INSPQ et d’une entente entre le MSSS, l’INSPQ et la DSPublique de Montréal, il a été décidé en mai dernier, avec l’accord de Dr Arruda, de ne pas recueillir l’information concernant l’ethnicité lors des enquêtes de santé publique.», nous indique Geneviève Richard, l’attachée de presse du ministre Charrette en réponse à la question de savoir si le gouvernement allait recueillir les données sur la race comme le fédéral le fait.
Cet article est écrit dans le cadre d'un financement du Programme nouveaux Horizons pour aîné.es du gouvernement du Canada