Le Festival international du Film black à Montréal-Nord
Le Festival international du Film black de Montréal(FIFBM) a atterri cette année, pour sa 16e édition, à l’arrondissement de Montréal-Nord où deux projections ont eu lieu vendredi soir : « Mahalia melts in the rain » de Carmine Pierre-Dufour et Emilie Mannering, et « Briser le code » de Nicolas Houde-Sauvé, suivies d’une causerie enrichissante avec la scénariste et réalisatrice Carmine Pierre-Dufour et le narrateur Fabrice Vil.
Il s’agit de la seule rencontre « présentielle » de cette édition qui se déroule complètement en ligne jusqu’au 4 octobre 2020.
Une cinquantaine de participants (pour respecter la distanciation physique), constitués en grande partie de jeunes résidents du quartier, se sont réunis dans la salle de spectacle du centre culturelle et communautaire de Montréal-Nord, pour assister à cette grande première de l’histoire du FIFBM.
Il s’agit de la concrétisation d’un rêve que caressent l’Arrondissement et la Fondation Fabienne Colas depuis 5 ans, a révélé Claudel Toussaint, directeur de la culture, des sports, des loisirs et du développement social à la Ville de Montréal-Arrondissement de Montréal-Nord, qui lançait l’événement.
« Mme Chantale Rossi, conseillère de ville, et moi, alors que nous étions responsables des activités relatives au centenaire de Montréal-Nord, avions voulu attirer dans notre arrondissement un grand festival qui se déroule au Centre-ville. Aujourd’hui, ce rêve est réalisé. Grâce à la Fondation Fabienne Colas, nous avons réussi à introduire le FIFBM dans notre quartier, le tout premier choisi dans le cadre de cette initiative qui doit toucher d’autres quartiers de Montréal dans les années à venir », s’est réjoui M. Toussaint.
Un quartier coup de cœur
Pour sa part, Fabienne Colas a salué l’implication de Desjardins et Québecor dans cette initiative baptisée : « Le FIFBM dans les quartiers », qui vise à permettre à des jeunes de différents quartiers de Montréal d’avoir accès gratuitement à des films black, sur leurs territoires respectifs, suivis de médiations culturelles.
« Nous avons choisi un quartier coup de cœur pour inaugurer l’événement », a lancé la présidente de la Fondation Fabienne Colas, qui présente le Festival international du Film black de Montréal comme un projet inclusif.
« Depuis 15 ans, sans s’en rendre compte, le FIFBM est devenu une activité du Centre-ville du fait que toutes nos salles étaient dans le Quartier des spectacles. Il était donc nécessaire de le ramener à nos différents quartiers. Et c’est ce que nous avons fait cette année, en commençant par Montréal-Nord, espérant qu’il sera toujours au rendez-vous parmi les autres quartiers qui intégreront l’activité dans le futur», a-telle argumenté.
Démocratiser la culture
De son côté, la conseillère d’arrondissement, Chantale Rossi, a salué l’arrivée du FIFBM à Montréal-Nord.
« Durant mon mandat précédent comme conseillère associée au comité exécutif pour la culture, le patrimoine et le design, j’ai beaucoup demandé à ce que les grands festivals de Montréal s’éclatent dans les arrondissements. Je trouvais que c’était important, car le rôle premier de la Ville de Montréal en matière culturelle, c’est de démocratiser la culture, de l’amener aux citoyens », a soutenu Mme Rossi.
Selon elle, c’est avec des événements comme le Festival international du Film black de Montréal qu’on arrivera à apporter la culture aux portes des citoyens.
Écrire pour dénoncer
« MAHALIA melts in the rain » est un court métrage dramatique canadien qui met en scène une petite fille noire de 9 ans, qui se sent différente des autres filles avec qui elle suit des cours de ballet. Pour lui donner confiance, sa mère l’amène dans un salon de coiffure se faire défriser les cheveux pour la première fois.
« Mahalia qui perd ses mots, son sourire et se fond sous la pluie, c’est ma vie, dans mon jeune âge, des souvenirs d’enfance, ce que j’ai vécu comme racisme », a avoué la scénariste Carmine-Pierre Dufour, de parents haïtiens.
Affirmant raconter ces histoires pour exprimer ce qu’elle a dans les trippes, elle entend continuer à poser des gestes concrets consistant à donner des rôles aux personnes « racisées ».
« C’est ce que je fais pour contribuer à une société plus égalitaire, c’est ma responsabilité face aux enjeux liés au racisme », souligne la réalisatrice.
« Briser le code », est un film documentaire québécois qui vise à faire prendre conscience à la majorité québécoise qu’il existe encore en 2020, pour les personnes « racisées » et autochtones, un code à suivre. Un code pour éviter le plus possible d’être discriminé, un code pour ne pas déranger.
Selon le narrateur de ce film, Fabrice Vil, il s’agit d’un phénomène selon lequel les membres des groupes minoritaires sont contraints d’adopter certains comportements et attitudes pour se fondre dans la majorité québécoise sans déranger.
D’origine haïtienne, il raconte qu’en primaire, il a dû changer d’école afin de soigner son accent pour se faire accepter par ses camarades québécois.
« Même à la cafétéria, je me suis fait discriminer pour mes délicieux lunchs haïtiens de riz et de griot. Pour cela, j’ai du opter pour du baloney, plus typique, et surtout moins exotique », confie-t-il.
Nadège Saint-Philippe, artiste et entrepreneure, qui faisait office de modératrice à la causerie, a apporté la note finale en encourageant les communautés noires à afficher, à revendiquer leur identité, à dire qui elles sont. Elle estime que le Festival international du Film black de Montréal est le moyen libérateur pour le faire.
« On est ici pour exister. On doit s’afficher dans toute sa splendeur. On dit non à l’effacement », a-t-elle conclu.
La 16e édition du FIFBM propose 120 films de 30 pays et des événements spéciaux inspirants. Considéré comme le plus grand festival de film black au Canada, il met en lumière, cette année, des sujets comme l’environnement, l’immigration, la musique, es droits humains, les droits des femmes et le racisme systémique.
Le FIFBM doit de la reconnaissance, cette année, aux coprésentateurs Desjardins et Québecor, à Téléfilm Canada, aux conseils des arts de Montréal, du Québec et du Canada, à Tourisme Canada, à la Ville de Montréal et aux autres festivals, dont le Festival international du Film black de Toronto et celui de Halifax.