Montréal en bleu et rouge
Alors qu’en Haïti une crise politico-économique s’invite à la fête du drapeau, le 2019 du bleu et rouge a été célébré en grande pompe à Montréal-Nord et dans Saint-Michel, deux quartiers qui regorgent d’Haïtiens, à Montréal.
Depuis 10 ans, l’arrondissement de Montréal-Nord encourage cette célébration, très courue par les politiciens, à travers un comité organisateur composé de Café-jeunesse multiculturel ou du Centre multiethnique.
La mairesse Christine Black ainsi que les membres du conseil, la députée Paule Robitaille (Québec) et le député fédéral Emmanuel Dubourg y prennent part régulièrement.
Toutefois, ils doivent se partager entre les festivités à Montréal-Nord et La perle retrouvée dans Saint-Michel. Depuis 16 ans, ce quartier tient sa propre fête du drapeau également.
Presqu’immédiatement après leurs interventions, les politiques de Montréal-Nord se sont empressés de se rendre à La perle pour un autre bain de foule en bleu et rouge.
Frantz Benjamin, député de Viau-Saint-Michel, Dominique Anglade, une autre députée d’origine haïtienne sous l’obédience des libéraux provinciaux, des représentants de la Ville de Montréal, la consule général a.i de la République d’Haïti, entre autres, rehaussaient l’éclat de la cérémonie.
Orchestre, chorale, tentes, kiosques, jeux gonflables pour les enfants, mets haïtiens, La perle n’a pas lésiné sur les moyens.
Pour le badaud étranger ou québécois qui se mêle à la foule bigarrée des Haïtiens en goguette, l’impression qui domine c’est la ferveur nationaliste autour de la Fête du Drapeau.
Catherine Flon doit se réjouir dans sa tombe de voir ainsi perdurer son geste devenu le symbole de l’Indépendance de tout un pays caribéen. Et il faut être bien loin de l’Arcahaie pour entendre enfin la totalité des versets de la Dessalinienne reprise à l’unisson par une foule fervente, alors que le fameux drapeau est monté lentement sur l’unique mât resté vide.
La Fête du Drapeau, c’est aussi le spectacle touchant d’une communauté exilée qui se retrouve le temps d’un événement patriotique.
Il y a ce vieil haïtien de la première génération de la diaspora qui a peut-être parcouru une longue distance en métro pour venir déguster son griot bananes pesées qu’il savoure méthodiquement en lentes mastications prononcées.
Il y a aussi cette jeune fille courtement vêtue engoncée dans un drapeau de son pays qui danse frénétiquement au son du DJ de service.
Et n’oublions pas les jeunes enfants nés au Québec qui n’ont probablement jamais vu leur pays d’origine et qui suivent docilement leurs parents qui évoquent Haïti en grands éclats de voix.
Pour eux, ce drapeau qui flotte au vent de Montréal est un peu abscond. Ils en découvriront la signification plus tard.