Dans le cadre d’une vaste mobilisation communautaire pour l’élimination du profilage racial à Repentigny, la participation citoyenne et la lutte contre le racisme, un Comité citoyen lanaudois (CCL) est créé avec le soutien de Centre de recherche action sur les relations raciales (CRARR) en vue d’aider des victimes à mieux  formuler leurs plaintes.

Ce Comité de vigie a été présenté aux médias mardi dernier et regroupe non seulement des personnes de la communauté noire mais aussi arabe qui font face «  à des incidents répétés de nature discriminatoire.»

« Nous sommes à 10 minutes de Montréal et pourtant la réalité est tout autre. D’où, la nécessité de nous rassembler pour trouver des solutions, d’exiger qu’on soit consultés lors de mise en place de politique qui vise les minorités.», lance d’entrée de jeu Amel Haroud, membre du Comité et qui a travaillé pendant plus de dix ans à établir des liens entre la communauté d’accueil et les nouveaux arrivants.

Contrôles d’identité injustifiés,  arrestations,  questions déplacées au sujet de leur marque de voiture et  filature de la part des agents du service de police de Repentigny, entre autres, constituent la toile de cette réalité dont parle Mme Haroud.

« Le problème est encore là, observe Serge Damord dont le fils a été victime de profilage, il n’y a rien qui se fait. Les victimes s’accumulent »

Le CRARR qui vient en aide au Comité dit avoir déterminé  deux types de profilage racial à Repentigny. Alain Babineau note un  niveau individuel du phénomène.

« Il y a certains policiers qui se basent sur des stéréotypes pour cibler des individus, parfois fondés sur des préjugés personnels ou de l’hostilité envers les personnes racisées. Et nous croyons que ces individus ne sont pas en majorité au Service de police de Repentigny.», dit-il.

Il ajoute que les personnes racisées qui s’aventurent sur le territoire du Service de police de Repentigny s’exposent à une pratique de profilage racial systémique qui découle de «  modèles de comportements, de politiques ou de pratiques qui font partie de la structure sociale et administrative d’une organisation. »

Le CRARR ainsi que le Comité de vigie travailleront à atteindre pas moins de sept objectifs.

• Faire reconnaître par la Ville de Repentigny et le SPVR de façon significative, la réalité du profilage racial, incluant son impact sur le bien-être des citoyens racisés de Repentigny, et sur leur confiance dans les organismes de maintien de l’ordre;
• Assurer la participation active de la communauté racisée de Repentigny à intervalles réguliers, de façon à obtenir leur point de vue franc et ouvert sur le vécu des victimes de profilage racial et les approches efficaces de lutte contre profilage racial;

• Faire adopter et mettre en œuvre par le SPVR des normes, lignes directrices, politiques et directives strictes appropriées pour composer avec le profilage racial en contexte de maintien de l’ordre et l’éliminer;
• La collecte et l’analyse par un groupe indépendant, des données relatives à la race dans toutes les activités du SPVR, afin de cerner et de réduire les disparités, et de gérer les activités;
• La surveillance régulière du profilage racial par le SPVR, afin d’assurer que cette organisation adopte de puissants mécanismes internes de responsabilisation en matière de gouvernance, de gestion et de fonctionnement;
• Apporter un changement organisationnel à dimensions multiples (visant par exemple la formation, la culture, l’embauche, les structures d’incitation) qui est conforme aux principes de la CDPDJ.
• Veiller à l’élaboration par le SPVR d’un plan de lutte contre le profilage racial qui inclut des initiatives visant à atteindre des cibles à court et à long terme de respect de chacun de ces principes.

Pas de problème de rapprochement

Le Comité citoyen lanaudois regroupe non seulement des leaders des communautés ethnoculturels, mais aussi des victimes de profilage également. Finley Damord, une jeune entrepreneur d’origine haïtienne, s’est fait intercepter par au moins six voitures de police vers 8h du matin alors qu’il se rendait à son travail.

Il se faisait questionner sur la voiture qu’il conduisait (une auto avec plaque F et donc commerciale). Il s’est fait poser beaucoup de questions très personnelles du genre : ce qu’il fait avec une voiture comme ça? Ou encore, ce qu’il fait dans la vie?

Finley Damord a porté plaintes auprès de la Déontologie policière qui a rejeté son grief sous prétexte que « les policiers faisaient leur travail.» « Bien qu’il y ait eu des failles dans la formulation de ma plainte, la déontologie aurait pu m’entendre », dit-il aujourd’hui.

Le jeune entrepreneur dit s’impliquer aujourd’hui afin d’éviter que cela arrive à d’autres jeunes des communautés culturelles. En plus de s’impliquer au sein du CCL, Finley Damord participe à des Cobras, sorte de jumelage avec une voiture auto-patrouille dans le but d’en apprendre davantage sur le métier de policier.

« J’ai compris que ce sont certains policiers  qui font du profilage. Je ne les placerais pas tous dans le même panier.», conclut M. Damord.

« Le seul problème est qu’on ne mette pas l’accent sur le profilage, mais plutôt sur le rassemblement, le rapprochement. Mais la problématique survient lorsqu’on est seul à seul avec le policier.»-

Finley Damord

«Sans vouloir faire l’analyse des qualifications ou l’évaluation de la performance de l’agent Fortier, la problématique dépasse la capacité d’un seul individu. »-A Babineau

Selon statistiques Canada 2016 sur environ 84000 de résidents à Repentigny, il y a 9595 minorités visibles dont 5800 noirs,1500 arabes et 1200 latinos. Selon nos renseignements, parmi les 121 policiers travaillant à Repentigny, trois sont issus des minorités visibles. Aucun policier noir.

Les plaintes

2018 : (6) plaintes – (1) clos en conciliation + (5) clos (non retenue);

2019 : (12) plaintes dont (3) d’un même individu + (6) d’un même individu / (4) clos (non retenue) + (4) référées en conciliation + (1) sous enquête + (3) en analyse.